Sol y sombra

Roman Jeunesse – Collection Signe de Piste


Jean-Claude ALAIN

Parutions :

Coll. SIGNE DE PISTE – n°32
Ed. DELAHAYE – 2004 – Coll. S2P – n°5


Résumé

Une histoire enthousiasmante, qui crie, chante et brûle parmi ces paysages de Vieille Castille, d’Estremadure et de Murcie, où Jean-Claude ALAIN a situé ses personnages. Entre sol y sombra, entre le côté à l’ombre et celui au soleil, dans la Plaza de Toros – dans l’arène – où des garçons en habit de lumière ont rendez-vous avec la bête, le fauve, le taureau.
Monde étrange et fascinant, que celui des corridas : l’émotion, la ferveur, la joie, la peur, et parfois la folie s’y rencontrent. Et aussi le malheur quand la corne frappe, et que l’adolescent acclamé une minute auparavant, n’est plus sur le sable souillé qu’un pantin désarticulé d’où la vie s’échappe avec le sang … Et pourtant, quoi de plus sensible, de plus attachant que ces deux garçons, José et Manuel qui, à dix-sept ans, affrontent le taureau parce que, pour eux, c’est le seul moyen d’obtenir un destin et de pouvoir un jour rejoindre les plus grands ?


Fiche de Lecture

Le titre de ce roman est la traduction littérale de soleil et ombre ou plus explicitement Ombre et Lumière. Il fait référence à la fois au soleil qui brille au-dessus des arènes espagnoles et à l’habit de lumière que revêtent les toréros pour aller combattre, l’ombre représentant les coulisses du spectacle, la peur du toréro avant son entrée, et la mort qui rode au dessus de cette ambiance joyeuse et colorée des corridas.
Mort qui frappera le taureau et peut-être aussi le vaillant combattant seul devant le mastodonte.
N’étant pas et de loin un adepte de ce sport que je juge cruel j’ai eu quelque difficulté à adhérer au texte de Jean-Claude Alain, en dépit de cette belle histoire d’amitié profonde entre deux ados déchirés par la vie et de mon admiration pour l’écriture de l’auteur.
Pourtant il s’agit bien d’une œuvre maitresse de la bibliographie de l’écrivain tant par le sujet traité que par la manière flamboyante avec laquelle il est décris qui entraîne le lecteur dans l’aventure.
Deux jeunes gens. Manuel, de souche noble a quitté sa famille ne supportant pas le remariage de sa mère, veuve, avec un homme rustre. José, orphelin, vit seul et travaille dans un hôtel à Avila (Espagne province de Castille Léon), il soigne et accueille Manuel chez lui lorsque celui-ci a été détroussé au coin d’une ruelle. Une amitié nait entre eux et comme le jeune homme n’a plus d’argent, José le fait embaucher comme pompiste par son patron..
José veut devenir toréro et participe à des novillada, courses pour débutants.
Il va entrainer son ami dans le monde de la tauromachie et des aficionados au cours d’un « Road movie » à travers la province espagnole, de contrat en contrat. Il rencontreront Ruy, un enfant déshérite qui se loue pour les combats. Manuel devra, au pied levé, remplacer José victime d’une crise d’appendicite la veille d’une corrida. Il mettra à mort son premier taureau. Tandis que Ruy de son côté se fera déchiqueter par un monstre en fureur et en mourra. Manuel retrouvera sa mère et, muri par l’expérience, comprendra enfin la nécessité de la laisser refaire sa vie.
Manuel et José seront peut-être les prochains Manolette car ils continueront leur aventure en duo décidés à devenir de grands matadors .
Il y a du Montherland dans cette admiration immodérée pour la corrida que Jean-Claude Alain décrit avec un enthousiasme communicatif.
L’amitié entre les deux ados courageux est parfois un peu trouble et certains dialogues témoignent de sentiments exacerbés. José fait découvrir à Manuel ce monde sauvage et fascinant de la tauromachie et de l’élevage des taureaux de combat et veut transmettre sa passion ou pour le moins la lui faire accepter.
L’auteur y parvient sans peine toutefois je lui reproche de parsemer son texte de mots techniques espagnols qui obligent le lecteur à se référencer sans cesse à l’appendice qui suit le texte ou au glossaire.
Nous n’échappons pas non plus à la rencontre avec des gitans: musique, danse, flamenco de rigueur autour du grand feu de bois. Quelques poncifs qui contribuent à valoriser le déroulement de l’action avec la couleur locale.
Le lecteur découvrira ce monde étrange, mystérieux voir envoutant, ce jeu entre la vie et la mort sous les « Olé » de la foule excitée . Il pourra frémir devant les passes habiles du toréro et les charges sauvages du taureau. Grace aux descriptions précises de l’auteur il imaginera l’arène pleine de bruit, de cris, de couleurs, de suspense et de folie. Les costumes d’or brillants de mille feux sous le soleil de plomb, les silences soudains et angoissés, l’émotion, la peur et l’exaltation de la victoire ainsi que la piété et la fierté du vainqueur.
Ce livre demeure, en dépit de nos propres réticences, un magnifique récit à la gloire de la tauromachie et nous permet d’en connaître les coulisses, les élevages de taureaux de combat, les impresarii et les contrats, les grandeurs et servitudes de ce métier hors du commun dont rêvent de nombreux adolescents.
Il n’échappe pourtant pas à une fin mélodramatique (cher à Dalens) avec la mort du jeune Ruy, matador de fortune. Jean-Claude Alain terminant ainsi son récit sur une mort tragique et un espoir de vie mêlant ombre et soleil « Sol y sombra »
Aficionado ou opposant à la corrida, l’histoire ne peut pas laisser indifférent, d’autant que la beauté des paysages castillans y apportent leur part de dépaysement, l’art du narrateur faisant le reste.

Analyse de M.B. – 2015