Lettre posthume à Pierre Joubert :
Signe de Piste, une Collection de Roman Jeunesse d’Aventure
Cher Pierre Joubert,
Je n’ai jamais eu l’honneur ni le bonheur de vous connaître autrement qu’à travers vos illustrations, et pourtant j’ai toujours été très proche de vous. Si proche même que j’ai longtemps songé à me destiner à la carrière d’illustrateur, sous l’influence des dessins et couvertures que vous réalisiez pour Scout et Signe de Piste dans les années 50.
Je n’avais ni le talent ni la persévérance indispensables pour suivre cette voie, le destin en a décidé autrement. Je me satisfais donc d’être un admirateur, quelque peu connaisseur, qui masque ses regrets en parlant de votre œuvre ou en écoutant et en lisant ceux qui ont eu le privilège de vous côtoyer et qui ont aimé autant l’homme que l’artiste.
Dès les premiers Signe de Piste que j’ai feuilletés, j’ai été frappé par ce style si particulier qui rendait beaux les êtres et les choses animés sous votre pinceau. J’ai compris plus tard, en découvrant vos tableaux de marines et les décors qui servaient de couvertures aux romans que vous illustriez que seul l’amour de la vie et des gens vous permettait, avec la technique maîtrisée, de faire ainsi découvrir le dessous des choses.
Il faut, en effet, aimer sincèrement les êtres humains et la nature pour n’en montrer que le meilleur, le plus admirable et aussi le plus secret.
Certes vous avez parfois cédé à la tentation de la caricature en accentuant les traits des adultes, signes de caractères. Ainsi le gendarme, la concierge, le notaire, l’homme d’affaires sont immédiatement reconnaissables et un peu malmenés, mais cet humour n’a jamais été teinté de malveillance et a surtout mis l’accent sur la différence entre l’adulte déjà marqué par la vie et l’enfant générateur de pureté. Pour nous, lecteurs juvéniles c’était une forme d’alarme pour veiller à ce que nous ne devenions pas trop rapidement des grands et que nous conservions en nous nos espoirs et notre idéal.
En 1957, je suis arrivé dans les dix premiers au ‘’Grand Concours d’été’‘ de dessins sur Mik Le Chat-Tigre. J’étais très fier de cette place honorifique (un peu déçu quand même) et j’ai reçu en prix un magnifique poster d’un scout présentant la loi. Il était dédicacé de votre main avec un petit mot sympathique. Il a longtemps orné fièrement le mur de ma chambre, et j’en étais aussi fier que si j’avais reçu un diplôme.
première partie de la postface de Michel BONVALET, extraite de l’Intégrale SIGNE DE PISTE Tome 3 – 1962-1970