Le Glaive de Cologne

Roman Jeunesse – Collection Signe de Piste


Jean-Louis FONCINE

Parutions :

Ed. ALSATIA – 1954 (première édition) Coll. SIGNE DE PISTE – n°71
Ed. DELAHAYE – 2009 – Coll. SIGNE DE PISTE – n°03


Résumé

Olivier Morellet, qui est devenu le compagnon de Jean-Claude et de Vermicelle, les héros des « Forts et les purs » part pour un camp dans un village de la Forêt Noire, invité par un message ambigu d’un jeune Allemand : Wolgang Wolf.
Olivier retrouve là-bas les traces de son père déporté et disparu en 1945. A mesure qu’il reconstitue les dernières semaines d’existence du prisonnier, il sent croître son amour et son admiration pour celui dont il a ressenti l’absence à l’égal d’une brûlure.
Mais une révélation terrible l’attend : son père, alors qu’il était à deux doigts de la liberté, a été livré à la police par un membre de la famille Wolf.
Cette énigme poignante trouve sa solution au cours d’un jeu raid de grande envergure qui se termine par une nuit d’orage dans un décor farouche, digne d’un conte des Nibelungen.


Fiche de Lecture

Trois ans après Les Forts et les purs, Foncine livrait encore un roman un peu décevant : loin de la magie de ses premiers titres, l’homme semblait chercher un renouvellement, un ressourcement, hors de son cher Pays perdu, mais en vain…
Bien sûr, Foncine possède un style, un métier qui fait que l’on suit tout de même les aventures d’Olivier Morellet à la recherche de son père prisonnier disparu en Allemagne en 1945 et sa rencontre avec Wolfgang Wolf. Mais l’on n’y croit guère, et l’atmosphère électrique et quasi-hystérique qui imprègne le roman laisse un sentiment désagréable de malaise (d’ailleurs pointé par Christian Guérin dans son fabuleux bouquin)… même si l’analyse des rapports père/fils ajoute une nouvelle profondeur psychologique, relativement inhabituelle chez Foncine, plutôt adepte de récit d’aventures que d’introspection.
Lorsque l’on sait que Wolfgang Wolf exista réellement, adolescent allemand membre de la Jeunesse Hitlérienne tué en 1945 qui égaya les journées mornes d’un Foncine prisonnier lui-même outre-Rhin, on comprend davantage que ce roman était probablement un hommage, et une dette que l’écrivain du Relais tenait à régler…
Foncine était un homme d’honneur et de fidélité, un homme libre aussi, dont le parcours intérieur épousa les formes sinueuses et parfois fuyantes d’une époque riche en catastrophes et en massacres.
Ballotté par l’Histoire, témoin impuissant de la montée du Mal et des horreurs à venir, il conservait une solide aversion pour tous ceux qui, durant sa jeunesse, se payèrent de mots et refusèrent d’envisager le pire, ce qui aurait peut-être permis de l’éviter… Il ne devint pas aigri pour autant, mais se méfiait des rhéteurs et autres bonimenteurs démagogues envoyant des gosses à une mort plus que probable.
Il avoua à Gabriel Matzneff qu’il avait cherché sa vie durant à former des groupes, car il ne croyait pas à la résistance individuelle, et qu’aider des ados ne pouvait se faire qu’en leur livrant le secret qui avait donné jour au Foulard de sang et à bien d’autres confréries : le respect de la parole donnée, et surtout l’amitié, une amitié vraie, dans les bons comme dans les mauvais jours.
Enfin, Foncine savait que son action réelle s’exerçait par la littérature de jeunesse, et qu’il serait temps de reconnaître en lui, mais aussi en Labat, Ferney, Dalens, Leprince et bien d’autres, d’authentiques écrivains d’un genre trop sous-estimé et sous représenté.
Que Rudyard Kipling, Jules Verne et Michel Tournier aient écrit pour les enfants et les adolescents ne semble toujours par avoir convaincu l’establishment littéraire français de l’importance de ce secteur, et que des écrivains comme Christian Lehmann ou Gérard Viguié ne soient pas reconnus aujourd’hui à leur valeur réelle d’artistes constitue ce qu’il faut bien appeler une injustice.
Faut-il donc être anglais et raconter les histoires d’un petit binoclard pour avoir l’honneur d’être cité et reconnu par nos quotidiens nationaux ?

Extrait de l’analyse de A.J. – 2005

Je viens de découvrir Le glaive de Cologne de Jean-Louis Foncine acheté tout récemment dans une bouquinerie du Bout du Monde (Finistère).
J’avais en son temps lu l’ouvrage de Foncine Les Forts et les Purs, j’étais alors en sixième, pensionnaire au lycée de Brest et je me souviens avoir été marqué par l’intrigue…
Aujourd’hui, par nostalgie, je me suis mis comme plusieurs d’entre nous à rechercher les livres qui avaient enchanté mon enfance et, au cours d’un salon littéraire en région parisienne, j’ai pu à la fois rencontrer Alain Gout et découvrir que l’esprit Signe de Piste avait survécu après tant d’années, bien que les livres aient disparu des vitrines des libraires !
J’ai pu également, ce jour-là discuter de scoutisme avec J-L Foncine et obtenir une dédicace sur le Relais de la Chance au Roy. Mais là n’est pas notre propos, revenons au Glaive.
L’action se situe au sortir de la seconde guerre mondiale (d’ailleurs le livre a été écrit entre 1952 et 1954). Olivier, au cours de la distribution des prix clôturant la fin de l’année scolaire, découvre la photo de classe de 1922 où pose son père et cela déclenche en lui le souvenir douloureux de la disparition de celui-ci déporté en Allemagne.
A quelques temps de là, la patrouille à laquelle appartient Olivier se rend à une mystérieuse invitation pour un camp dans un petit village de Forêt Noire. Là, Olivier rencontre deux jeunes Allemands, Wolfgang et Karl, deux frères également orphelins et petit à petit il découvrira ce qu’ont été les dernières semaines de l’existence de ce père tant chéri. Bien entendu, la famille de Wolgang et de Karl y sera mêlée. Et c’est à la fin du grand jeu qu’Olivier apprendra la vérité…
L’auteur termine son ouvrage par la visite de la cathédrale de Cologne où Olivier et Wolfgang découvrent dans une vitrine le glaive, « magnifique symbole de la Charité et de la Force ». J-L Foncine en profite pour pourfendre ceux qu’il nomme apprentis-sorciers qui, par appétit, instincts, frénésies matérielles ou intellectuelles cherchent à régenter « leur société de protozoaires ». et vante « l’Homme vrai » capable de tenter « les plus hautes aventures, celles qui ont laissé des symphonies, des cathédrales, des poèmes de génie. »
Ce livre est un formidable hymne à l’amitié entre des garçons que tout devrait opposer, à la fraternité franco-allemande et à la création de l’Europe … chrétienne.
Bien que le scoutisme ne soit que le prétexte à la rencontre des deux personnages, nous n’échappons pas aux classiques : grand jeu, dilemme cornélien, le texte oublié qu’on retrouve, la fierté et le cœur pur.
J-L Foncine, au style enlevé, nous montre qu’il sait ne pas être que l’auteur truculent de La Bande des Ayacks ou l’historiographe du scoutisme mais aussi celui qui au travers des ses deux ouvrages Les Forts et les Purs et Le glaive de Cologne, exalte les valeurs humaines fondements nécessaires de notre société.

Commentaire de Jacques Sergent – 2004 – jeuxdepiste