La Mort d’Eric

Roman Jeunesse – Collection Signe de Piste


Serge DALENS

Parutions :

Ed. ALSATIA – 1943 – Coll. SIGNE DE PISTE – n°12
(première édition)

Ed. FLEURUS – 1994 – Coll. SIGNE DE PISTE


Résumé

Ce livre est la brûlante conclusion de l’histoire du Prince Eric.
Il ne s’agit plus d’un roman, mais d’un récif qui se situe dans la terrible période de la guerre 39-45, et qui n’a rien perdu de son actualité, car, comme l’écrit Serge Dalens : « … Je pense, moi, qu’un garçon de quinze ans… est un garçon, c’est-à-dire un homme… Je pense qu’il peut tout comprendre, aussi bien, mieux peut-être qu’une « grande personne », précisément parce qu’il allie la générosité de l’enfant à la vigueur de l’homme. Parce qu’il sait tout ce qu’on lui cache et n’en dit rien… »
Mais qu’il est difficile, même pour un adolescent, de sourire à la mort !


Fiche de Lecture

Ce récit est une énigme… Censé clore la saga du Prince Eric, achever ce mythe littéraire et le refermer à jamais, il le propulse dans un maelström de chagrin et de larmes, de douleurs et de regrets, ceux du lecteur qui, à quinze ans, aujourd’hui comme hier, se retrouve anéanti de tristesse… Figure christique errant sur les plages du désastre, se souciant encore du plus pauvre, du plus fragile, du plus oublié, Eric porte l’enfant au flanc écarlate de sang, aux blessures scandaleuses. Le prince s’en va mourir dans un hôpital de campagne, saint patron de la Solitude, guerrier sans gloire, plus ignoré encore que le plus humble de ses sujets…
Promis à la Royauté, instrument du règne de la Justice, il échoue, à quelques mètres du père de son ami, Christian. Et meurt, en silence, le jour de ses dix-huit ans, comme n’importe quel combattant obscur… Serge Dalens cède à tous les sortilèges et détours du romantisme, fait appel aux plus vieilles recettes et ficelles éhontées des mélos du Boulevard du Crime… et ça marche ! Marche funèbre, Pavane pour un Prince sacrifié, tombé dans un combat inutile. Inutile, mais inéluctable dans l’univers de Dalens où le seul salut possible vient des armes et de la mort violente. Christian deviendra soldat, comme Rémy de Terny, comme Philippe, comme Ralfsen…
Après le « Bracelet », après la « Tache », ses héros ne peuvent vivre que dans le fracas des batailles, seul substitut adulte possible au scoutisme de leurs quinze ans, seule oasis de féodalité dans un monde décidément, pour l’auteur, trop moderne… Ce récit devient aussi le journal de marche d’une défaite, d’une débacle. Rarement un livre pour adolescents n’aura à ce point montré le vrai visage d’un monde qui s’effondre… Enfermé dans une fascination paternelle envahissante, nourrissant à jamais des regrets pour une carrière militaire pour laquelle il n’était pas taillé, Dalens sonne la retraite de sa jeunesse : Eric meurt parce que la Beauté doit mourir, parce que la jeunesse ne peut que mourir pour rester fidèle à elle-même, parce qu’au moment où il écrivait ces lignes, Serge Dalens saluait une dernière fois sa propre enfance, sa jeunesse. Eric vieillissant, envahi par le doute, acceptant les compromissions, parce qu’exister c’est composer avec le réel, Eric quittant le masque de Tadzio pour devenir Aschenbach ? Impossible…
Il faudrait rester sur ces dernières pages de La Mort d’Eric et ne pas céder aux séquelles tardives, douteuses qui vinrent, bien longtemps après. Que nous importent les détails du règne, les tractations diplomatiques, le brevet d’anti-nazisme cinquante ans après la bataille… Le Prince Eric ne compte que quatre tomes, ‘’for ever », quatre piliers du Temple, où les genres (roman scout, psychologique, policier, récit de guerre…) se télescopent, se mêlent, dans des années 30 désormais de pacotille, de convention, tragiques, drôles parfois, amères souvent…
…/…

première partie de l’analyse d’Alain JAMOT, extraite de l’Intégrale SIGNE DE PISTE Tome 1 – 1937-1955