La Chevauchée de Yellowstone
Roman Jeunesse – Collection Signe de Piste
Jean-Claude BERRIER
Parutions :
Editions Alsatia. – 1972 – Safari – Signe de Piste n°42
(première édition)
Editions DELAHAYE – 2017 – Collection SIGNE DE PISTE n°64
Résumé
La Chevauchée de Yellowstone, c’est un roman, bien sûr : l’aventure de cinq adolescents que le hasard entraîne dans une fascinante randonnée en pays indien, au cœur des Montagnes Rocheuses. Philippe et Nicole, enfants d’un diplomate français, parviendront-ils à éteindre la haine inexplicable que leur voue dès l’abord Sim, ce garçon farouche, élevé dans les grands espaces d’un ranch du Far-West ? Terry et Ted partageront leurs joies et leurs peines : les grandes étapes à cheval, les bivouacs dans la forêt, à l’affût des élans et des castors, les surprises puis l’angoisse d’une étrange et dangereuse odyssée dans la Réserve des Indiens Pieds-Noirs.
Fiche de Lecture
On s’attend, au vu des états de service de l’auteur, membre de la Société Française des Explorateurs, réalisateur pour Connaissance du Monde et un peu scout sur les bords, à ce que La Chevauchée de Yellowstone soit un documentaire de haut vol, digne de la BBC, instructif et d’une bonne humeur inoxydable. On s’attend placidement aux grands espaces, aux chapeaux de cow-boy et à la note de bas de page didactique sur l’éruption quotidienne de Old Faithful. En bref on s’attend à ce que pourrait donner un explorateur confirmé que l’envie prend d’écrire « son » Signe de Piste. Surprise, le résultat est au-delà de toutes les espérances.
Ce n’est pourtant pas si étonnant. Une expérience telle que celle de Jean-Claude Berrier est bien moins hétérogène qu’il y paraît : exploration, roman de jeunesse, scoutisme et Signe de Piste, tout cela se tient. L’un des membres fondateurs de la Société des Explorateurs n’était autre que Paul Coze, figure légendaire des premiers temps du scoutisme français. On y croise pareillement Paul-Emile Victor, autre scout notoire. Quant à l’imaginaire de la collection, il a toujours été résolument tourné vers l’ouverture de l’esprit à l’autre et l’ailleurs, qu’il soit mental (l’âge adulte), social (les délinquants de Dalens), historique, politique (les romans humanitaires de Viguié ou d’Edith Lesprit) voire colonial. L’ailleurs géographique n’est bien entendu pas en reste. C’est le credo du Signe de Piste : tout mais pas le quotidien m
ortifère. La surprise n’est pas que Jean-Claude Berrier ait écrit un Signe de Piste, c’est qu’il n’en ait écrit qu’un seul.
Or donc, il était une fois un ranch du Montana, mi-ferme mi-hôtel, où vivaient trois adolescents, Ted, le plus vieux, et Sim et Terry, frère et sœur. Arrivent deux français, frère et sœur aussi, et un projet : partir à cheval plusieurs jours dans le splendide parc naturel de Yellowstone. Tout va donc pour le mieux dans le meilleur des mondes. Tout ? Non. Le père de Sim et de Terry, correspondant de guerre, s’est fait tuer quelques années auparavant par des balles françaises alors qu’il réalisait un reportage sur les fellaghas. Comme vous l’aurez deviné depuis une ligne ou deux, l’officier présent sur les lieux, c’était le père des deux petits Français qui viennent de débarquer en beechcraft sur la piste jouxtant le ranch. Ca sent l’orage. Pendant que sa sœur fait le dos rond et qu’on découvre que le frenchie Philippe est agressif quand on le cherche, Sim traverse les mêmes étapes de la passion que visite la Phèdre de Racine : il les vit, il rougit, il pâlit à leur vue, un trouble s’éleva en son âme éperdue, ses yeux ne voyaient plus, il ne pouvait parler, il se sentait et transir et brûler. Bref, Sim va se transformer en un caractériel de première volée qui va saboter opiniâtrement tout ce qui pourrait favoriser l’amitié franco-américaine. Bonjour l’ambiance. Mais l’on se met en selle, même si l’envie a subitement disparu, et l’on chevauche sans aucun adulte vers des trafics d’alcool menés par un mauvais employé de ranch et vers des indiens surexcités par leur pow-wow annuel. 4 ans avant Tintin et les Picaros, la recette des ennuis, dispensée par un chef trois étoiles.
Alors non, La Chevauchée de Yellowstone n’est pas partie pour être un beau documentaire avec des forêts et des geysers. La simple randonnée tient pourtant une grande place : le style ciselé de l’auteur, qui maîtrise l’adjectif et le « détail vrai » comme peu de monde, transfigure l’itinéraire, les bivouacs, la vision de la nature au point qu’on souhaite ardemment y être présent. Mais le meilleur du roman, ce sont bien entendu les vapeurs de Sim. S’il rentre assez facilement dans les canons du « garçon blessé » à la sauce Signe de Piste et dont le modèle est le Pierrick du Juge Avait un Fils, Sim le fait avec son style à lui. Il ne joue pas les inaccessibles ténébreux. Au contraire il se débat, il prend sur soi, il fait des efforts, il r
etombe misérablement, il va bouder, il revient de bonne humeur, ça ne dure pas, le frenchie n’y met pas tellement du sien, on échange des taloches, les filles se rongent les ongles d’anxiété. Sim subit, il se débat contre la passion, on voudrait l’aider. On voit bien que dans le fond, il est adorable. En somme, c’est du rodéo mental et Sim est le bronco que l’on n’a pas encore marqué au fer rouge. « Ces quelques secondes de souffrance, est-il dit plus tôt au sujet du marquage d’un vrai cheval, sont le prix à payer pour qu’il vive en liberté tout le reste de sa vie ». Attention, symbole.
Outre les méchants trafiquants d’alcool, c’est finalement un gros ours aux yeux sans doute injectés de sang mettra tout le monde d’accord vers la fin. Sous la plume d’un autre auteur, ce récit serait devenu « le Club des Cinq au Far West ». Jean-Claude Berrier, lui, a fait de la Chevauchée de Yellowstone l’un des secrets bien gardés de la collection. Le roman en manifeste tous les traits : dépaysement, amitié, combats, histoire, dépassement de soi… et même un petit côté « fringues ». L’auteur, en 1972, promettait d’autres aventures. Elles n’auront jamais lieu. Hélas !
Analyse de P. Schneider – 2018
Fiche de Lecture
Ce roman d’aventures, plein de suspense et de rebondissements, se déroule dans le magnifique cadre des Montagnes Rocheuses et au sein de la Réserve des Indiens Pieds Noirs. Trois adolescents américains, qui vivent dans un ranch du Far-West, préparent avec joie une belle expédition dans l’enceinte du parc naturel de Yellowstone. Or, l’arrivée inopinée de Philippe et Nicole, enfants d’un diplomate français, va modifier tous leurs plans. C’est désormais à cinq qu’ils devront partir. Sim, l’un des jeunes américains, est furieux et son attitude glaciale et méprisante ne laisse rien présager de bon. Mais au cours de cette grande chevauchée, au milieu des dangers et des péripéties qu’ils ne tardent pas à devoir affronter, les cœurs vont peu à peu s’ouvrir et chacun va découvrir chez l’autre des qualités qu’il ne soupçonnait pas. De bonnes valeurs de courage, de générosité et d’amitié, mais également de très belles descriptions de cette région splendide, font de ce livre un bien agréable dépaysement. Deux mots sont malheureusement à regretter (p. 12 et p. 65), mais il serait vraiment dommage de se priver du livre pour autant..
Analyse d’AFS – Paris 17e – 2018