Le Relais de la Chance au Roy

Roman Jeunesse – Collection Signe de Piste


Jean-Louis FONCINE

Parutions :

1941 – Première édiion (couv. bichromie de Pierre Joubert, int. : Cyril)
1946 – Réédition avec dessins intérieurs de Pierr Joubert
1954 – Jaquette couleur

Ed. DELAHAYE – 2008 – Coll. SIGNE DE PISTE – n°01


Résumé

Un soir d’orage, un groupe de garçons lancé dans une audacieuse exploration, découvre une antique voie romaine et un étrange relais de poste au cœur d’une forêt.
A minuit juste, une scène hallucinante se joue sous leurs yeux : un jeune cavalier, poursuivi et traqué, tombe de cheval à leurs pieds. Ils le réconfortent mais, au matin, lorsqu’ils veulent l’interroger, le garçon a disparu.
Tel est le point de départ d’une aventure prodigieuse qui se poursuit à travers bois, rivières, châteaux, souterrains mystérieux …


Fiche de Lecture

Note de lecture :
Les ruines d’un relais de poste abandonné se dressent dans la nuit profonde…
Le feu de bois crépite, envoyant des flammèches dont la lumière rougeoyante souligne la fatigue et l’angoisse sur les visages des Hirondelles….
Le bruit des sabots d’un cheval au galop, frappant les pavés irréguliers de la vieille route de poste, va s’amplifiant …
La lumière vacillante d’une torche enflammée reflète les ombres inquiétantes de la galerie de portraits du château de la Folie…
Le rire diabolique de Barbello se répercute sur les parois du souterrain…
Jean-Pierre (dit Jondick) connaît-il la vérité ?
Quel sort pour le jeune Chiquito ?
S’il est un roman qui représente la collection Signe de Piste (outre la saga du Prince Eric et la Bande des Ayacks) c’est bien Le Relais de la Chance au Roy !
La patrouille des Hirondelles de Xavier, Robert et Jean-Pierre est aussi célèbre que les Loups de Christian, Philippe et Eric.
Il fait partie de la première collection (Alsatia) dont les premiers romans furent résolument tournés vers le scoutisme, tel que le vivait la jeunesse d’avant et d’après guerre. Les antécédents des animateurs de la collection au sein de ce mouvement de jeunesse justifiant amplement cette volonté littéraire.
Bien qu’il n’ait aucunement vieilli, il faut lire ou relire cette aventure avec les yeux des jeunes hommes qui ne connaissaient ni la télé, ni les portables, ni l’informatique, ni les jeux vidéos et même pas encore l’attirail moderne dont furent affublés plus tard les Raiders (Radio, talkie-walkie, motos etc…) dès 1950.
La patrouille des Hirondelles vit son aventure en Scouts traditionnels plus proches de la vie indienne et de la chevalerie, selon les principes de BP que du camping organisé tel qu’il se pratique aujourd’hui.
Le rêve d’aventures des patrouillards est issu de leurs lectures et également de ces grands jeux fantastiques qui émaillent leur vie de scouts. De ces jeux dont si souvent, après une vie d’adulte, on se souvient encore avec nostalgie.
De l’aventure, du mystère organisé on sort grandi et plus conscient de sa force ou de ses faiblesses. Que les chefs à l’imagination fertile (dont firent partie Foncine et Joubert) soient remerciés car ils ont permis à des enfants, au cours de grands jeux bien organisés, de connaître leurs premiers sentiments forts (peur, courage, amitié, esprit d’équipe…)
Le Relais de la Chance au Roy est un « polar » aventureux qui mêle l’histoire de France (par hasard), la vie de patrouille (avec des rapports forts entre les garçons), la peur souvent génératrice de courage, l’intelligence (celle de Jean-Pierre, tout particulièrement) et l’amitié.
Un roman qui nous tient en haleine dès la première ligne
Jean-Louis Foncine dans ce style aisé qui lui est propre nous promène à travers les forêts profondes de son Pays Perdu, à la rencontre des villages forestiers, des rivières sauvages et des châteaux mystérieux habités par d’étranges familles.
Il tisse le mystère autour d’un enfant poursuivi rencontré de nuit dans un relais abandonné sur une route de poste datant de l’époque romaine.
Après quelques heurts entre les scouts et les bergers locaux se terminant par une fantastique mêlée générale, les Hirondelles sauront dénouer l’intrigue pour la plus grande satisfaction du lecteur.

Analyse de M.B.

Ce livre est un miracle… comme une inspiration rimbaldienne, un pur moment de grâce dont l’auteur n’avait probablement pas conscience lorsqu’il s’en délivra… Tout respire en ce livre la poésie, la joie, l’accomplissement, tout renvoie à ce moment mystérieux où les adolescents deviennent insensiblement des hommes, et que le sérieux de la vie d’adulte entrevue se marie à l’excitation du Jeu comme métaphore de l’existence. Dernières années, non pas d’insouciance ou de légèreté, mais de rêves, d’espérance, mélange de puérilité et de gravité, d’invention libre et de grégarisme…
Foncine construit sa monade personnelle, où l’adolescence demeure le stade supérieur de l’achèvement de l’être et où l’adulte n’est qu’un ange déchu, amputé de sa jeunesse, souillé par son sérieux et son manque d’héroïsme… Il construit son propre monde, avec bien sûr la Forêt, cette présence mystérieuse et enveloppante, ce temple sauvage et pourtant accueillant, cet univers hors du temps où le passé percute le présent à chaque instant et où les coeurs purs comprennent enfin ce qui se joue vraiment dans une existence…Il a écrit là le roman scout absolu : les protagonistes sont scouts, l’action est un grand jeu scout et le décor du livre le ‘’Pays Perdu ».
Signe de Piste – 1975…On pense au Grand Meaulnes bien sûr, mais aussi au Gide de Si le grain ne meurt, pour ces descriptions gourmandes et complices de l’ennui pesant des salles de classe et des stratégies garçonnières pour le contourner. Et si Foncine fréquentait ‘’Stan », et Gide l’Ecole Alsacienne, on retrouve chez chacun d’eux ce mythe écolier, ces imaginations qui bouillonnaient dans les collèges bourgeois du siècle dernier…
Foncine a capté dans ces pages ce qui demeure l’apanage du scoutisme : la vie dans la nature (le ‘’woodcraft » si cher à Paul Coze…), l’autonomie de la patrouille, la bande organisée autour d’une Loi, le bonheur d’une vie sans adultes l’espace de quelques jours, et cette délicieuse ambiguïté entre fiction et réalité qu’on ne trouve qu’au coeur du Jeu…
« Je vous le dis, le jour est peut-être proche où notre jeu sera la vie et où la vie, au sens étriqué où l’entendent les hommes de maintenant, comptera pour des haricots ! » (Préface de la dernière édition du ‘’Relais »).

Extrait de l’analyse de A.J. – 2005

Dans la première version en 1941, Jean-Louis Foncine offrait un rôle particulier à Mr Barbello, précepteur de Chiquito, qui s’égarait entre fiction et réalité et donnait un côté plus dramatique au roman. L’auteur a expurgé les éditions suivantes sans en diminuer la valeur littéraire et sans faire souffrir l’intrigue.
La dernière édition (Delahaye) objet de cette fiche de lecture, présente en comparatif les illustrations anciennes de Pierre Joubert et les illustrations les plus récentes, ce qui en fait une oeuvre originale qui séduira les collectionneurs et permet de constater l’évolution du trait du Maître tout en conservant le même style aisément identifiable.
Pour ma part, ayant lu ce roman très jeune, j’ai préféré les illustrations d’origine, au trait, qui soulignent l’aspect plus mystérieux, parfois angoissant, du récit : arbres torturés, nuits profondes, pièces du châteaux inquiétantes, ombres démesurées. Le lavis adoucit trop ces contrastes en lissant un peu l’aspect dramatique des personnages et des situations.
Jean-Louis Foncine signait là sa seconde œuvre et confirmait son très grand talent d’auteur. Il n’a cessé jusqu’à sa disparition de nous enchanter par son écriture enlevée, son humour un tantinet ironique et la qualité des intrigues proposées où l’honneur et l’amitié le dispute à l’aventure.

Commentaire de M.B..